Ali est vivant #séisme #Turquie #Syrie
Un souffle
ténu, murmure léger comme une plume. Des heures, des jours, aussi longs
qu’un hiver.
Du silence, des nuits, aussi noirs
que la terre.
L’innocence tendre utérus de
la survivance,
le nourrisson une
biche apaisée dans la forêt du chaos.
Deux yeux, sombres soleils sous
les décombres.
Toute une chaine salvatrice. Oubliés,
guerre et ennemis. Le monde entier se fige
devant les écrans:
Un chien aboie, comme fou, des hommes
pleurent, on Le loue, des femmes crient.
Lourdes pierres, soudain trouée,
clairière, vie:
naissance en poussière, miracle
d’une unique résurrection.
Là où étaient cris de guerre règne la grâce. Une
incantation jaillit de toutes les
espérances, qui dit à nouveau son sens véritable :
Allāhu akbar“ , ٱللَّٰهُ أَكْبَرُ.
Le petit Ali est vivant.

Castres, on dit de toi « Petite Venise »

Castres, on dit de toi « Petite Venise »

Rivière aux chutes insolentes,
ailleurs torpeur
aux berges alanguies:
un coche d’eau songeur
dérive vers Gourjade…
Au Jardin du Mail des nénuphars
sourient.
Je tiens la main
de ma grand-mère…

Au loin, promesse
de sapins et de mousses:
en Montagne Noire, les bleus ont
un parfum de Vosges des Suds.
Maquis, Harkis, l’Histoire
en cœur battant fait du Tarn
un bastion.

Au marché on bade, on rit, on parle fort.
Les poumpets au citron défient les
melsats au gras des dimanches.
Jaurès veille son monde,
commandeur tutélaire
d’un peuple farouche
et fier.

Tisserands et pastels
racontent leurs antans.
En venelles timides
imaginer des Huguenots
murmurant un psaume…
Au musée, Goya
voit en Castres une
flamboyante Madrilène.

Berceau des ancêtres au Payssel,
fief de lignées paysannes
ne sachant signer
en vallées chantantes du Sidobre.
Maison natale de mon père
emplie de clichés sépia…
Revenir souvent marcher
à Saint-Hyppolite, humer
encore miel gouleyant
de papi et oreillettes
de mamie.
Leurs mains calleuses
emplies de
tendresse.

Parisienne, tu fais ta coquette
avec tes buis taillés par
Le Nôtre au Jardin de l’Évêché…
Et puis Lutèce, tu la regardes
du haut de ton Bouclier de Brennus!
Plus sauvage qu’Albi la
Rouge,
tu fais déjà route
vers la mer.
Antichambre des garrigues,
des méandres aux thyms
fous filent vers
les sables.

Sous le pont Miredames
coule l’Agout,
ses verts en frondaison
marine…
Castres, on dit de toi
« Petite Venise »,
mais tes maisons
comme autant de nefs
sur l’eau
reflètent un cœur
immense.


Rose, enfant soleil de la Morariusgasse #RoseAusländer #essai #Allemagne

Rose, enfant soleil de la Morariusgasse
Rose, enfant soleil de la Morariusgasse,
tu dansais l’innocence entre violons de
Chagall et lilas, en allégresse
parfumée.
Ta Bucovine un paradis.
*
Rose, princesse de Saba si fière en cœur battant
de l’Europe,
tu vivais heureuse, ta
petite Vienne creuset
des cultures. Les mots
des messagers des mondes : la philosophie
te grandit, la poésie t’enfante.
*
Rose, soudain cachée meurtrie épouvantée,
jeune femme courage,
rossignol du ghetto en espérance
de lumière.
Ta Bucovine un enfer. Mais
écrire. Tes mots-tocsins
t’abritent.
Béance de la Shoah :
Rose, tu es Sarah, Déborah, Rachel, tu es David, Chlomo, Haïm.
*
Rose, ton exil. Les staccatos
de la Grosse Pomme
en écho au silence
de l’indicible.
Ta langue-mère cri des bourreaux.
Ta voix, orpheline perdue
des mondes assassinés.
Tu es debout mais un fantôme.
Ta Bucovine effacée, morcelée, écartelée.
*
Rose, ta renaissance en souffle
neuf. Petite fiancée des mots
retrouvés, tu jaillis en
poésie, inextinguible.
Le Queen Mary t’emporte
vers tes terres
anciennes,
l’Italie te restaure.
Héliophage, tu
récuses les nuits pour affirmer
la vie.
Ta Bucovine un miroir sans tain.
Ne jamais la revoir, la chanter
toujours.
*
Rose, tu écris, tu noircis mille
pages, parcourant
ton Europe, barcarolle
fragile des paix
balbutiantes. Ta valise de
soie te suffit, ta langue-mère
te nourrit. On te lit, te découvre,
t’honore.
Ta Bucovine t’habite.
*
Rose, tu t’alites, vieille dame
malicieuse. Ton lit un palais.
Tu y écriras jusqu’à
ton dernier souffle,
le Nordpark canopée
de tes mémoires.
Ta Bucovine berceau
de tes milliers
d’étoiles.

Rose, Sonnenkind der Morariusgasse
Rose, Sonnenkind der Morariusgasse ,
du tanztest die Unschuld zwischen Chagall Geigen
und Fliedern, in duftender
Freude.
Deine Bukowina ein Paradies.
*
Rose, so stolze Prinzessin von Saba im pulsierenden Herzen
Europas,
du lebtest fröhlich, dein Klein-Wien Schmelztiegel
der Kulturen. Die Wörter
Botschafter der Welten: Die Philosophie
bringt dich groß, die Lyrik gebärt dich.
*
Rose, plötzlich versteckt verletzt verwirrt,
junge Frau-Courage,
eine Nachtigall im Ghetto, strebend nach
Licht.
Deine Bukowina eine Hölle. Aber
Schreiben. Geborgen in deinen
Sturmglockenwörtern.
Abgrund der Shoah:
Rose, du bist Sarah, Deborah, Rachel, du bist David, Schlomo, Haïm.
*
Rose, dein Exil. Die Staccatos
Big Appels ein Echo
des Schweigens des
Unsagbaren.
Deine Muttersprache Schrei der Henker.
Deine Stimme, verlorenes Waisenkind
der ermordeten Welten.
Du stehst noch, aber ein Gespenst.
Deine Bukowina ausradiert, zerbröckelt, zerrissen.
*
Rose, deine Neugeburt in neuem
Pneuma. Kleine Verlobte der zurückgefundenen
Wörter, in Lyrik sprudelnd, unzerstörbar.
Die Queen Mary trägt dich
heim ins Land der Vergangenheiten,
Italien baut dich auf.
Eine Sonnenpriesterin: Du lehnst
die Nacht ab, um das Leben zu
behaupten.
Deine Bukowina ein Einwegspiegel.
Sie nie wiedersehen, sie singen aber
immer.
*
Rose, du schreibst, du dichtest tausend
Seiten voll, bummelst durch dein
Europa, zerbrechliche Barkarole der
stammelnden Frieden. Dein
Seidenkoffer genügt dir, deine
Muttersprache versorgt dich. Man liest,
entdeckt, ehrt dich.
Deine Bukowina bewohnt dich.
*
Rose, Du legst dich hin, schelmische
alte Dame. Dein Bett ein Palast.
Da wirst du bis zu deinem letzten
Atem schreiben,
der Nordpark Baumkrone
deiner Erinnerungen.
Deine Bukowina Wiege
deiner tausend
Sterne.
https://sabine-aussenac-dichtung.blogspot.com/2022/07/rose-sonnenkind-der-morariusgasse.html
Fête des mères (qu’on aime très fort…) #fêtedesmères

Vous aussi, vous avez entendu cette histoire de Fête des mères qui serait remplacée par une « fête des gens qu’on aime » ?
Vomir. Vomir encore. Encore vomir. Se sentir nauséeuse du matin au soir, parfois durant neuf mois. Et pleurer, souvent.
Certes, on a soudain une poitrine XXL et une peau de bébé (tiens donc !). Mais pour une envie de fraise, combien de nausées ?
Là, je trouve qu’on touche le fond de l’ultra-wokisme. Bon, déjà, ce matin, sur un réseau social, j’ai eu le malheur de traiter un VIP, directeur d’un beau musée toulousain, de pisse-vinaigre car il faisait allusion à Pétain… Bloquée illico par le contempteur de colliers de nouilles (d’accord, je l’ai cherché, car je lui demandé si on ne devrait pas annuler la « Fête des Voisins » car ceux d’Anne Frank l’avait dénoncée…), je persiste néanmoins dans ma colère face à cette nouvelle tendance qui tend à gommer le genre et à brouiller les codes.
La douleur est si forte. Insupportable. Inimaginable. Incontrôlable, et pourtant on a ahané sur l’air du petit chien et appris à s’auto masser le ventre.
On est habituées, pourtant, surtout quand on souffre d’endométriose ou de simples règles douloureuses. Voilà des années qu’une fois par mois on la rencontre, cette douleur. Et soudain elle est là, potentialisée au centuple.
Hurler, blêmir, croire qu’on va mourir.
Et puis la délivrance si bien nommée : et l’enfant paraît. Et tout est oublié -puisque l’on va, souvent, recommencer…
Incroyable rencontre d’une vie portée et soudain au creux de nos mains. Ce premier souffle de notre nouveau-né, ce peau à peau : le miracle.
Déjà, je suis fatiguée des sempiternelles allusions françaises à cette fête qui serait pétainiste. Non, elle a été inventée par une Américaine et est fêtée dans le monde entier. Cessons un peu ce nombrilisme historique qui gâche l’enthousiasme de millions de petits bouts si fiers de leur tortue en pâte à sel ! Certes, c’est vrai, le Maréchal, qui faisait tout comme oncle Adolf, a trouvé malin de glorifier les mères dans cette optique KKK qui faisait fureur outre-Rhin (désolée c’est les nerfs… ) – Pour ceux qui ne le sauraient pas, KKK signifie, dans l’ordre que vous voudrez, « Kîrche, Küche, Kinder », et ce ne sont pas les Talibans qui contrediront cette belle formule : Église, cuisine, enfants.
Les pleurs, des heures, des nuits durant! Ne plus savoir quoi faire. On a allaité, ou donné le biberon, câliné, changé, dorloté, porté, promené, mis sur le ventre sur notre main et avant-bras, bercé.
Les pleurs, des heures, des nuits durant. Hagarde, on se lève, on tâtonne, on a peur que bébé s’étouffe à force de s’égosiller. Si on a repris le travail, on se sent comme dans du coton, hors de notre corps, dans cet état entre veille et sommeil.
Heureusement, la joie est là, à chaque heure : premier échange de regard, premier doigt serré, premier sourire. Quelle beauté ! Comment imaginer que cette petite merveille est passée de graine à enfant ?
Mais nous sommes en 2022. Cela fait longtemps que les Françaises sont sorties des fourneaux et qu’elles ne ressemblent plus vraiment à des desperate housewifes… Les Allemandes aussi, d’ailleurs, qui ont enfin gagné le droit de travailler et de ne pas se consacrer exclusivement à leur têtes blondes, même si cela a été un peu plus compliqué qu’en France.
Par contre, ce qui ne passe pas, cette année, c’est cette histoire de fête des gens qu’on aime. Parce qu’une maman, ce n’est pas « simplement » une personne que l’on aime. C’est le début, l’alma mater, l’alpha et l’omega. C’est l’être qui a porté, nourri, de l’intérieur, puis de l’extérieur, qui a couvé de longs mois durant cette vie en devenir, avant de s’en séparer dans de terribles souffrance et d’accueillir cette mise au monde unique et toujours renouvelée. Et dans le cas d’une maman qui a adopté, c’est l’être qui s’est battu des années durant pour faire aboutir un projet, puis qui est parfois allé au bout du monde pour se rendre à la rencontre de cet enfant si désiré, avant de l’aimer avec autant de force que si ce petit avait été chair de sa chair…
Les premières fièvres sont épouvantables. On croit que notre enfant ne passera pas la nuit. Combien d’heures, de cette première rhino ou varicelle à cette appendicite de notre ado, de cette première chute depuis une balançoire jusqu’à cet accident de scoot, passées à veiller, à angoisser, à arpenter des couloirs d’hôpitaux au gré des diverses maladies ou blessures, à composer le 15, à courir à la pharmacie de garde ? Combien de draps changés lors des gastros, de genoux écorchés pansés, de dolipranes remués, de thermomètres désinfectés, de livres d’homéo dévorés, de tisanes filtrées ?
Quand tout va bien, c’est merveilleux. Voir l’étincelle de complicité illuminer le regard d’un enfant heureux ne ressemble à rien d’autre. Toute mère ressent cette étrange crampe de fierté au creux du ventre quand elle assiste à une scène particulièrement émouvante, comme un concert de flûte lors d’une fête de fin d’année -et aussi cette même crampe en voyant son enfant tomber ou se cogner, crampe qui devient boyau serré et qui nous coupe la respiration…
Une maman, ce n’est PAS un papa. N’en déplaise aux mélangeurs de sexes qui voudraient gommer toutes nos différences, une maman est cette créature dotée d’un utérus où grandira bébé et de seins qui souvent le nourriront. Différence toute bête, animale, primitive, simple : la NATURE a fait que ce sont, jusqu’à preuve du contraire, les femmes qui portent les enfants… Lorsqu’il nait, il paraît que bébé est capable de reconnaître la voix et l’odeur de sa mère entre mille… Loin de moi l’idée de nier le rôle fondateur et fondamental des pères, sans lesquels rien ne serait possible. Si le papa a été présent lors de la grossesse, le petit d’homme va aussi reconnaître la voix grave qui lui aura parlé, et se blottira tout aussi tendrement contre le torse de son géniteur.
Une maman, ce n’est pas n’importe qui. Parce que des « gens qu’on aime », il y en a toute une kyrielle ! De la tatie gâteau à la mamie fofolle, du papi moustache à la cousine de Marseille, et puis nos copains, et puis nos voisins, et puis nos maîtresses, nos profs… Qu’est-ce-que c’est que cette manie de vouloir tout mélanger, tout mixer, comme dans une bouillasse informe, dans un marron qui aurait oublié le vermillon et l’azur et jusqu’à l’arc-en-ciel ?
Les devoirs. Des heures qui, mises à la queue leu leu, feraient le tour de la terre… Des heures passées à expliquer, avec plus ou moins de patience, comment faire les boucles du « m » ou comment résoudre une équation… Et les fournitures ! Ces heures durant lesquelles on erre, échevelées, à la recherche du cahier A4 400 pages grands carreaux, avant de passer une nuit blanche pour couvrir les livres… Et les réunions de parents, ces heures sombres où, tapies sur une petite chaise dans un couloir gris, on serre les fesses avant l’admonestation du prof de techno… Et les fêtes de fin d’années, ces après-midis où, sous un soleil de plomb, on assiste, imperturbables, au défilé des enfants des autres (dont on a un peu rien à cirer) avant de hurler de joie et d’applaudir à tout rompre quand notre progéniture nous danse un quadrille…
Ces premières fois qui se répètent… Première rentrée en maternelle, avec Petit Ours Brun sur la besace ; première rentrée en primaire, fierté et allégresse de couper à pas feutrés le cordon… Premières vacances loin de nous : oser confier, déléguer.
Mais toujours, l’inquiétude.
Laissez-nous la Fête des Mères. Et celle des papas ! Parce qu’il aussi émouvant d’entendre un poème récité par un bambin aux joues roses pour sa « maman chérie » que de le voir se pavaner en disant trois vers pour son « papa adoré » !
Tant de moments me reviennent en mémoire… Les journées à la gloire de ma propre maman, si fière de ses quatre enfants, et nos récitations de Maurice Carême…. Cette fête des mères durant laquelle j’ai annoncé à ma maman que je serai bientôt mère à mon tour… Les dessins pailletés de mes filles, les cartes merveilleusement décorées de mon fils, les câlins du dimanche matin quand nous jouions à « la tente » dans le grand lit, et puis les robes de princesses mises pour l’occasion et nos sorties au restaurant… Un magnifique week-end en Auvergne, un autre à Luchon, et, plus tard, les sms, les appels, les petits paquets…
Les savoir loin. Ne plus être là pour préparer petits-déjeuners et cartables, pour laver le linge. Terminés, les samedis passés à faire les boutiques, les soirées télé, les fous-rires. Les imaginer seuls, malades, en proie à l’adversité.
Apprendre à leur faire confiance. Respecter leurs choix, leurs silences, leurs ruptures.
Mais toujours : les aimer.
Alors je sais que les familles actuelles ne sont plus celles de nos enfances. J’ai moi-même eu des enfants de deux lits différents, et je suis la première à approuver la gay pride et à trouver émouvants ces enfants qui parlent fièrement de leurs « deux mamans » ou « deux papas ». Tout est possible, vive les marches des Fiertés et tous les rêves de filiations diverses.
MAIS : même si l’une de mes filles dit « mes parents » en parlant de son papa et de sa compagne, même si je sais aussi que dans certains peuples l’enfant est élevé par toute une tribu, même si certains affirment que tout est intersexe, je persiste et signe, et, personnellement, les « gens que j’aime » le plus au monde demeurent… mes trois enfants !
On n’a qu’une maman ! Bonne fête donc à toutes les mères du monde !
Mais où sont passés mes bébés ?
Portes qui claquent
Fou rires et larmes
Frigo aussitôt vidé
Pleurs au téléphone
Et les copains qui sonnent
Des heures devant les miroirs
Le p’tit top de chez Zara
Et tous les gloss d’Yves Rocher
Il me faut ABSOLUMENT des bottes
Et soudain un piercing à l’arcade
Mais où sont passés mes bébés ?
Appels entre parents inquiets
Et le père d’Octavie il est recasé ?
Tu pars à Soulac avec Rosanna ?
Tiens, Raphaelle a rappelé
C’est vrai qu’elle part à Paris ?
Nuit de réveillon très agitée
Malibu pastis et toujours nutella
Elles sont saoules bien avant le foie gras
Attention j’appelle papa !
Mais où sont passés mes bébés ?
Des nuits passées au téléphone
Disserts faites à 6h du mat
Et le stress de la convoc perdue
Je m’en fous j’irai pas
MSN jamais débranché
Salut ça va et toi
Je le kiff grave le nouveau pion
T’as vu la tronche de ce gros c… ?
P…ma mère elle est trop ch…
Son nouveau copain j’te raconte pas !
Non c’est pas vrai j’ai jamais fumé
Ah oui du sheet mais tout le monde le fait !
Mais où sont passés mes bébés ?
Et le beau Paul qui dort sur le canapé
Des caleçons dans ma baignoire
Tu peux m’acheter la pilule ?
J’aimerais aussi des lentilles
Mais tout le monde y va à ce concert
C’était l’année de terminale
De mon aînée qui est partie
Quand elle m’a dit le dernier soir
Que c’était vraiment le tout dernier repas
De sa vie avec moi
Je ne voulais même pas le croire
On rigolait avec Sonia
Et puis même les copines ont changé
Madame Pauline et Pierrette j’les connais pas
Et puis à Lille il fait bien froid
Pourquoi t’es partie comme ça ?
Mais où sont passés mes bébés ?
Même la cadette elle est partie
Faire des bijoux dans le Berry
Normal elle a de l’or dans les doigts
Sa vie là bas je la rêve parfois
Et j’entends encore les portes qui claquent
Il faut changer le bac du chat
Qui peut descendre les poubelles ?
Maman t’as encore déteint mon linge !
Qui a fini le nutella ?
Je peux avoir un nouveau forfait ?
Il faut que je m’achète Coldplay
Mais où sont passés mes bébés ?
Heureusement elles vont bien je le sais
Mais elles me manquent à chaque instant
Malgré les disputes le manque de temps
Et tous ces maux ces mots violents
Elles sont superbes ce sont mes enfants.




Flocons duveteux des mémoires #esclavage #mémoire #abolition
Flocons duveteux des mémoires

Flocons duveteux
voletant aux mains d’ébène,
grâce des Gazelles riant
en chants bénis
des gospels
azuréens.
Chaînes asphyxiant les grands
cous de ces Princes
dignes
debout,
même au fond des cales
putrides de cent mers.
Villages énucléés
de leurs enfants perdus,
cases vides au pisé dés
mémoires:
mil ranci de l’absence,
le lion orphelin
a perdu
ses Massaï.
L’Oncle Tom devenu
fou et mille Vierges
offertes aux Maîtres sanguinaires;
en Louisiane aveuglée
le bayou se fait honte.
Le Mississippi aujourd’hui un vieux Nègre
enfin affranchi.
Sur les Quai des esclaves notre
France commémore:
Bordeaux ou Saint-Malo, Lorient
et Nantes, compromissions
de l’Histoire hélas recommencée:
Migrants en cales sombres,
charniers méditerrans
aux enfants morts vivants,
leurs petits corps
étoiles de mer sur nos plages,
chantiers-bagnes des
Arabies noyant
les innocents dans leurs sables
indignes.
Et ces femmes, tant de femmes,
Gazelles suppliciées
aux mains des
souteneurs,
jeunes rires nubiles
dans l’enfer de
Daesh,
tant de femmes
esclaves, aujourd’hui
comme
hier.
Flocons duveteux des mémoires
voletant aux mains d’ébène,
grâce des Gazelles riant
en chants bénis
des gospels
azuréens.


Meaulnes, attends-moi #Berry #Sologne #AlainFournier

Mordorures des platanes
en coulée verte.
Bourges aux velours
pourpres somnole
en grandeur.
Berry, terres lourdes, labours,
attelages et moissons…
Eaux passantes du canal
où se mirent
ombrelles et
hauts-de-forme.
Au détour des fougères
murmure fête
blanche.
Meaulnes, attends-moi…



Espoc gris de la Nordsee #occitan #Allemagne #famille
Espoc gris de la Nordsee

*
Wiebke, ton pichon nom coma sens
cara. Ta mainada tan nombrósa
retrobada sus un aubre
sépia: Heinrich, Walter, Werner,
Willy, Heinz, Erika, Gertrud, e
Anneliese, la mia grand.
*
Wiebke, te saber nascuda a las bòrnas
de l’Euròpa e de las mars, quasi insulari.
Espoc gris de la Nordsee, marèias
d’immens, ostals
mirgalhats, flaira de nau
e de sau. Mans
encoissinadas dels òmes,
chalutièrs e merluça,
pimparèlas timidas tartalhant
la prima.
*
Mai que mai, aguères
fam.
Wiebke, te somiar drolleta
meravilhada de solelh,
endimenjada davant brica
sorna de la glèisa, en aquesta
Alemanha encara verge
dels infèrns. Imaginar
t’abraçar davant
èrsa tendra.
*
Non pas
te desbrembar.

*
Embruns gris de la Nordsee
*
Wiebke, ton prénom presque sans
visage. Tes enfants si nombreux
retrouvés sur un arbre
sépia: Heinrich, Walter, Werner,
Willy, Heinz, Erika, Gertrud, et
Anneliese, ma grand-mère.
*
Wiebke, te savoir née aux confins
de l’Europe et des mers, presqu’insulaire.
Embruns gris de la Nordsee, marées
d’immenses, maisons
bigarrées, odeurs de nacelles
et de sel. Mains
calleuses des hommes,
chalutiers et morue,
pâquerettes timides balbutiant
le printemps.
*
Souvent, tu as
eu faim.
Wiebke, te rêver enfant
émerveillée de soleil,
endimanchée devant brique
sombre de l’église, dans cette
Allemagne encore vierge
des enfers. Imaginer
t’embrasser devant
vagues tendres
*
Ne pas
t’oublier.


Je porte en moi souvent mille juifs qui suffoquent #SarahHalimi #Shoah #antisémitisme

Je porte en moi souvent mille Juifs qui suffoquent,
Et tant de matins blancs que déchirent leurs cris.
Tous ces appels glacés, ces visages enfuis,
C’est comme un souvenir dont tant de gens se moquent.
Ceux qui me disent allons, la Shoah, c’est fini !
Regarde un peu l’Afrique, et tous les naufragés,
Et puis tous ces enfants qui sont morts en Syrie,
Sans parler de Gaza et de ses sacrifiés…
Mais très obstinément, comme un grand vent de plaine,
Je les entends mugir, vociférer leurs haines,
Et je les sens souvent, les barbares affamés,
Roder autour de nous qu’ils voient en proies faciles,
Car oui le Juif c’est nous, c’est toi, c’est le Fragile :
Celui que le Nazi pour toujours veut traquer.
Merci à Pascal Huvet pour la bouleversante lecture de ce texte:
Un lien vers ses vidéos poétiques:
https://www.youtube.com/channel/UCx28fBypOjuy2zxLeY6zIZA

Et soudain la cascade #JournéedelaTerre #écologie #réchauffementclimatique
Humus et sentes sombres gorgées de
mousses,
forêts en résonnance animale.
Touffeurs de jungles, cris déchirants
la canopée.
Splendeur de l’orchidée, témoin millénaire, ses
fastes en flamboyance intemporelle,
et soudain la cascade,
ses eaux-torrents fumantes,
calumet de la paix des roches et des
lianes.
Terreau matriciel des plantes
chamanes. Au fleuve infini, des pépites
d’or scintillent en innocence.
(Cycle « Avant les hommes »)

On dit que les Inuits #JournéedelaTerre #écologie #changementclimatique

On dit que les Inuits possèdent des centaines de mots
pour dire
la neige.
Là où notre neige est simple comme
un drap immaculé,
les habitants de l’Arctique ont nommé
l’indicible, le fragile, l’intangible du flocon et
du crissement sous les peaux de phoque.
On dit que la France possède des centaines de libertés
pour dire
les droits de l’homme.
Pourtant, là où la démocratie devrait être lumineuse comme
la fraternité,
nos enfants ne savent plus ressentir ni partager
la blancheur, la candeur des innocences,
perdus
au milieu des incivilités, des insultes, des fanges belliqueuses des puissants ou
des faibles.
Je rêve de ce jour où nous serions tous à nouveau
les enfants de la Terre, goûtant de la langue les flocons
attendus et sachant en allégresse
faire cercle et méridien.
D’autres textes, consacrés aux peuples anciens, aux tribus disparues ou dévastées, parsèment encore ce recueil que vous trouverez sur Amazon et qui cherche un éditeur…