Fête des mères (qu’on aime très fort…) #fêtedesmères

Vous aussi, vous avez entendu cette histoire de Fête des mères qui serait remplacée par une « fête des gens qu’on aime » ?

Vomir. Vomir encore. Encore vomir. Se sentir nauséeuse du matin au soir, parfois durant neuf mois. Et pleurer, souvent.

Certes, on a soudain une poitrine XXL et une peau de bébé (tiens donc !). Mais pour une envie de fraise, combien de nausées ?

Là, je trouve qu’on touche le fond de l’ultra-wokisme. Bon, déjà, ce matin, sur un réseau social, j’ai eu le malheur de traiter un VIP, directeur d’un beau musée toulousain, de pisse-vinaigre car il faisait allusion à Pétain… Bloquée illico par le contempteur de colliers de nouilles (d’accord, je l’ai cherché, car je lui demandé si on ne devrait pas annuler la « Fête des Voisins » car ceux d’Anne Frank l’avait dénoncée…), je persiste néanmoins dans ma colère face à cette nouvelle tendance qui tend à gommer le genre et à brouiller les codes.

La douleur est si forte. Insupportable. Inimaginable. Incontrôlable, et pourtant on a ahané sur l’air du petit chien et appris à s’auto masser le ventre.

On est habituées, pourtant, surtout quand on souffre d’endométriose ou de simples règles douloureuses. Voilà des années qu’une fois par mois on la rencontre, cette douleur. Et soudain elle est là, potentialisée au centuple.

Hurler, blêmir, croire qu’on va mourir.

Et puis la délivrance si bien nommée : et l’enfant paraît. Et tout est oublié -puisque l’on va, souvent, recommencer…

Incroyable rencontre d’une vie portée et soudain au creux de nos mains. Ce premier souffle de notre nouveau-né, ce peau à peau : le miracle.

Déjà, je suis fatiguée des sempiternelles allusions françaises à cette fête qui serait pétainiste. Non, elle a été inventée par une Américaine et est fêtée dans le monde entier. Cessons un peu ce nombrilisme historique qui gâche l’enthousiasme de millions de petits bouts si fiers de leur tortue en pâte à sel ! Certes, c’est vrai, le Maréchal, qui faisait tout comme oncle Adolf, a trouvé malin de glorifier les mères dans cette optique KKK qui faisait fureur outre-Rhin (désolée c’est les nerfs… ) – Pour ceux qui ne le sauraient pas, KKK signifie, dans l’ordre que vous voudrez, « Kîrche, Küche, Kinder », et ce ne sont pas les Talibans qui contrediront cette belle formule : Église, cuisine, enfants.

Les pleurs, des heures, des nuits durant! Ne plus savoir quoi faire. On a allaité, ou donné le biberon, câliné, changé, dorloté, porté, promené, mis sur le ventre sur notre main et avant-bras, bercé.

Les pleurs, des heures, des nuits durant. Hagarde, on se lève, on tâtonne, on a peur que bébé s’étouffe à force de s’égosiller. Si on a repris le travail, on se sent comme dans du coton, hors de notre corps, dans cet état entre veille et sommeil.

Heureusement, la joie est là, à chaque heure : premier échange de regard, premier doigt serré, premier sourire. Quelle beauté ! Comment imaginer que cette petite merveille est passée de graine à enfant ?

Mais nous sommes en 2022. Cela fait longtemps que les Françaises sont sorties des fourneaux et qu’elles ne ressemblent plus vraiment à des desperate housewifes… Les Allemandes aussi, d’ailleurs, qui ont enfin gagné le droit de travailler et de ne pas se consacrer exclusivement à leur têtes blondes, même si cela a été un peu plus compliqué qu’en France.

Par contre, ce qui ne passe pas, cette année, c’est cette histoire de fête des gens qu’on aime. Parce qu’une maman, ce n’est pas « simplement » une personne que l’on aime. C’est le début, l’alma mater, l’alpha et l’omega. C’est l’être qui a porté, nourri, de l’intérieur, puis de l’extérieur, qui a couvé de longs mois durant cette vie en devenir, avant de s’en séparer dans de terribles souffrance et d’accueillir cette mise au monde unique et toujours renouvelée. Et dans le cas d’une maman qui a adopté, c’est l’être qui s’est battu des années durant pour faire aboutir un projet, puis qui est parfois allé au bout du monde pour se rendre à la rencontre de cet enfant si désiré, avant de l’aimer avec autant de force que si ce petit avait été chair de sa chair…

Les premières fièvres sont épouvantables. On croit que notre enfant ne passera pas la nuit. Combien d’heures, de cette première rhino ou varicelle à cette appendicite de notre ado, de cette première chute depuis une balançoire jusqu’à cet accident de scoot, passées à veiller, à angoisser, à arpenter des couloirs d’hôpitaux au gré des diverses maladies ou blessures, à composer le 15, à courir à la pharmacie de garde ? Combien de draps changés lors des gastros, de genoux écorchés pansés, de dolipranes remués, de thermomètres désinfectés, de livres d’homéo dévorés, de tisanes filtrées ?

Quand tout va bien, c’est merveilleux. Voir l’étincelle de complicité illuminer le regard d’un enfant heureux ne ressemble à rien d’autre. Toute mère ressent cette étrange crampe de fierté au creux du ventre quand elle assiste à une scène particulièrement émouvante, comme un concert de flûte lors d’une fête de fin d’année -et aussi cette même crampe en voyant son enfant tomber ou se cogner, crampe qui devient boyau serré et qui nous coupe la respiration…

Une maman, ce n’est PAS un papa. N’en déplaise aux mélangeurs de sexes qui voudraient gommer toutes nos différences, une maman est cette créature dotée d’un utérus où grandira bébé et de seins qui souvent le nourriront. Différence toute bête, animale, primitive, simple : la NATURE a fait que ce sont, jusqu’à preuve du contraire, les femmes qui portent les enfants… Lorsqu’il nait, il paraît que bébé est capable de reconnaître la voix et l’odeur de sa mère entre mille… Loin de moi l’idée de nier le rôle fondateur et fondamental des pères, sans lesquels rien ne serait possible. Si le papa a été présent lors de la grossesse, le petit d’homme va aussi reconnaître la voix grave qui lui aura parlé, et se blottira tout aussi tendrement contre le torse de son géniteur.

Une maman, ce n’est pas n’importe qui. Parce que des « gens qu’on aime », il y en a toute une kyrielle ! De la tatie gâteau à la mamie fofolle, du papi moustache à la cousine de Marseille, et puis nos copains, et puis nos voisins, et puis nos maîtresses, nos profs… Qu’est-ce-que c’est que cette manie de vouloir tout mélanger, tout mixer, comme dans une bouillasse informe, dans un marron qui aurait oublié le vermillon et l’azur et jusqu’à l’arc-en-ciel ?

Les devoirs. Des heures qui, mises à la queue leu leu, feraient le tour de la terre… Des heures passées à expliquer, avec plus ou moins de patience, comment faire les boucles du « m » ou comment résoudre une équation… Et les fournitures ! Ces heures durant lesquelles on erre, échevelées, à la recherche du cahier A4 400 pages grands carreaux, avant de passer une nuit blanche pour couvrir les livres… Et les réunions de parents, ces heures sombres où, tapies sur une petite chaise dans un couloir gris, on serre les fesses avant l’admonestation du prof de techno… Et les fêtes de fin d’années, ces après-midis où, sous un soleil de plomb, on assiste, imperturbables, au défilé des enfants des autres (dont on a un peu rien à cirer) avant de hurler de joie et d’applaudir à tout rompre quand notre progéniture nous danse un quadrille…

Ces premières fois qui se répètent… Première rentrée en maternelle, avec Petit Ours Brun sur la besace ; première rentrée en primaire, fierté et allégresse de couper à pas feutrés le cordon… Premières vacances loin de nous : oser confier, déléguer.

Mais toujours, l’inquiétude.

Laissez-nous la Fête des Mères. Et celle des papas ! Parce qu’il aussi émouvant d’entendre un poème récité par un bambin aux joues roses pour sa « maman chérie » que de le voir se pavaner en disant trois vers pour son « papa adoré » !

Tant de moments me reviennent en mémoire… Les journées à la gloire de ma propre maman, si fière de ses quatre enfants, et nos récitations de Maurice Carême…. Cette fête des mères durant laquelle j’ai annoncé à ma maman que je serai bientôt mère à mon tour… Les dessins pailletés de mes filles, les cartes merveilleusement décorées de mon fils, les câlins du dimanche matin quand nous jouions à « la tente » dans le grand lit, et puis les robes de princesses mises pour l’occasion et nos sorties au restaurant… Un magnifique week-end en Auvergne, un autre à Luchon, et, plus tard, les sms, les appels, les petits paquets…

Les savoir loin. Ne plus être là pour préparer petits-déjeuners et cartables, pour laver le linge. Terminés, les samedis passés à faire les boutiques, les soirées télé, les fous-rires. Les imaginer seuls, malades, en proie à l’adversité.

Apprendre à leur faire confiance. Respecter leurs choix, leurs silences, leurs ruptures.

Mais toujours : les aimer.

Alors je sais que les familles actuelles ne sont plus celles de nos enfances. J’ai moi-même eu des enfants de deux lits différents, et je suis la première à approuver la gay pride et à trouver émouvants ces enfants qui parlent fièrement de leurs « deux mamans » ou « deux papas ». Tout est possible, vive les marches des Fiertés et tous les rêves de filiations diverses.

MAIS : même si l’une de mes filles dit « mes parents » en parlant de son papa et de sa compagne, même si je sais aussi que dans certains peuples l’enfant est élevé par toute une tribu, même si certains affirment que tout est intersexe, je persiste et signe, et, personnellement, les « gens que j’aime » le plus au monde demeurent… mes trois enfants !

On n’a qu’une maman ! Bonne fête donc à toutes les mères du monde !

Espoc gris de la Nordsee #occitan #Allemagne #famille

Espoc gris de la Nordsee

*

Wiebke, ton pichon nom coma sens

cara. Ta mainada tan nombrósa

retrobada sus un aubre

sépia: Heinrich, Walter, Werner,

Willy, Heinz, Erika, Gertrud, e

Anneliese, la mia grand.

*

Wiebke, te saber nascuda a las bòrnas

de l’Euròpa e de las mars, quasi insulari.

Espoc gris de la Nordsee, marèias

d’immens, ostals

mirgalhats, flaira de nau

e de sau. Mans

encoissinadas dels òmes,

chalutièrs e merluça,

pimparèlas timidas tartalhant

la prima.

*

Mai que mai, aguères

fam.

Wiebke, te somiar drolleta

meravilhada de solelh,

endimenjada davant brica

sorna de la glèisa, en aquesta

Alemanha encara verge

dels infèrns. Imaginar

t’abraçar davant

èrsa tendra.

*

Non pas

te desbrembar.

Heini, le premier fils de Wiebke…

*

Embruns gris de la Nordsee

*

Wiebke, ton prénom presque sans

visage. Tes enfants si nombreux

retrouvés sur un arbre

sépia: Heinrich, Walter, Werner,

Willy, Heinz, Erika, Gertrud, et

Anneliese, ma grand-mère.

*

Wiebke, te savoir née aux confins

de l’Europe et des mers, presqu’insulaire.

Embruns gris de la Nordsee, marées

d’immenses, maisons

bigarrées, odeurs de nacelles

et de sel. Mains

calleuses des hommes,

chalutiers et morue,

pâquerettes timides balbutiant

le printemps.

*

Souvent, tu as

eu faim.

Wiebke, te rêver enfant

émerveillée de soleil,

endimanchée devant brique

sombre de l’église, dans cette

Allemagne encore vierge

des enfers. Imaginer

t’embrasser devant

vagues tendres

*

Ne pas

t’oublier.

Anneliese, ma merveilleuse grand-mère, et son époux, son Erich adoré.
Husum - Die graue Stadt am Meer | Hafenstimmung | malp007 | Flickr